truvada_1 On l’appellera Wilfried. Wilfried a 38 ans et vit en Allemagne, où il a commencé depuis peu à se faire livrer illégalement ses pilules. Grâce à un inconnu qu’il a rencontré sur Facebook, il est parvenu à trouver le contact d’un distributeur indien pour s’en procurer régulièrement. Il utilise un service de réacheminement qui fait passer la marchandise par le Royaume-Uni pour ne pas éveiller les soupçons, et il les réceptionne ensuite à la poste allemande. Wilfried – dont ce n’est pas le vrai nom – se fait expédier plus de 90 pilules à la fois, juste assez pour que cela passe inaperçu. On dirait une histoire de trafic de drogue, mais ce n’est pas ce dont il s’agit. Les pilules que commande Wilfried l’aident à lutter contre une maladie : le Sida. Il s’agit de Truvada, le traitement préventif contre le VIH disponible en France depuis janvier. L’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a émis pour trois ans une recommandation temporaire d’utilisation (RTU) pour le Truvada en prévention. Le New England Journal of Medicine a estimé que la pilule était à 99 % efficace pour empêcher la transmission du VIH lorsqu’elle est prise quotidiennement. Malgré tout, elle reste interdite dans la plupart des pays du monde – et notamment en Allemagne. En conséquence de quoi trouver un médecin disposé à prescrire le traitement est quasiment mission impossible, et sans couverture maladie il peut en coûter entre 500 et 1 000 euros par mois au malade qui veut se faire livrer le traitement. Le Truvada a été approuvé aux États-Unis, au Canada, au Kenya, au Pérou et en Afrique du Sud. En France, en Suisse et en Israël, son accessibilité est limitée. Et au Royaume-Uni, le National Health Service a promis le 19 avril dernier qu’il reconsidérerait sa décision d’interdire le traitement sur le territoire, comme c’est le cas en Allemagne. 107091580-1024x652 Crédits : PBS News C’est pourquoi Wilfried, qui se procure la marchandise sur alldaychemist.com, utilise un service de réacheminement qui transite par le Royaume-Uni, où les commandes sont autorisées. En additionnant tous les frais, il paye 68 euros pour une boîte de 30 pilules. « Je compte sur le fait que les douanes sont en sous-effectif, elles ne font pas trop attention aux marchandises circulant à l’intérieur de l’Union européenne, tant qu’il ne s’agit pas de drogues », dit-il. « Mais la situation n’est pas rassurante actuellement, et cela rend difficile le fait de recommander la prophylaxie pré-exposition (PrEP) aux autres. » « Quand vous avez peur de la mort, d’être malade du Sida et du risque que vous courez à chaque fois que vous avez des rapports sexuels, ce n’est pas rien d’avoir une pilule auprès de soi qui peut vous en protéger », explique Jim Pickett, directeur du département prévention de la Fondation SIDA de Chicago. « Avoir un traitement à disposition qui est susceptible de vous protéger a un effet psychologique très puissant. » C’est le cas pour Wilfried. Il s’est découvert homosexuel au début des années 1990, et le Sida semblait à l’époque inévitablement conduire à la mort. « C’était si impressionnant que je n’ai jamais réellement pu me laisser aller dans ma sexualité », raconte-t-il. « À la place, je me reprochais et je reprochais aux autres de la vivre pleinement. Ce traitement me donne au moins en partie la tranquillité que je n’avais jamais pu vivre jusqu’ici. » Source : La PrEP VIH/New England Journal of Medicine Une découverte qui pourrait révolutionner la médecine du sang. ↓ bjjgqg