La créature ci-dessus ne vous évoque sûrement rien. Malheureusement, c’est aussi le cas pour la majorité de la classe scientifique, partout dans le monde. Avec ses ailerons, ses yeux globuleux qui rappellent ceux des crabes, ses pinces et ses crocs acérés, le Monstre de Tully vivait il y a environ 300 millions d’années, dans les eaux peu profondes de la côte Est des États-Unis. Cette espèce a été découverte en 1955 par Francis Tully, célèbre collectionneur de fossiles, dont elle tire son nom. Des centaines de fossiles avaient alors été découverts dans des eaux boueuses au niveau de l’Illinois. Un grand nombre d’entre eux sont aujourd’hui conservés au Field Museum de Chicago. Alors que l’espèce est restée non-classée depuis sa découverte, l’année dernière, deux études (ici et ) affirmaient qu’elle appartenait en fait à la famille des vertébrés. La parution de ces résultats a réveillé l’intérêt de la communauté scientifique. De nombreux chercheurs ont également commencé à plancher sur ce mystère de la biologie. Le 20 février dernier, une nouvelle étude avance que, finalement, le Monstre de Tully ne serait probablement pas un animal vertébré aquatique. « Cet animal reste très difficile à classifier car il est incontestablement très étrange », explique Lauren Sallan de l’université de Pennsylvanie. « Mais ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas un poisson. » Selon Sallan, la structure interne des fossiles ne permet pas d’affirmer quoi que ce soit de la sorte. Une équipe de chercheurs de l’université de Yale, dirigée par la paléobiologiste Victoria McCoy, s’est appuyée sur la ligne qui court le long des fossiles pour affirmer qu’il s’agissait invariablement d’une colonne vertébrale. Mais une autre étude, menée cette fois-ci par des chercheurs de l’université de Leicester, au Royaume-Uni, a employé une technique plus complexe pour l’examiner. Celle-ci aurait révélé une structure oculaire complexe, signe évident que la créature était un vertébré. Ce sujet fait plus que jamais débat dans la communauté scientifique. Car pour le moment, personne n’est capable de dire ce qu’il est vraiment. Et dans ce domaine, avant de tirer quelques conclusions que ce soit, il est indispensable que les preuves soient solides. Or, pour le Monstre de Tully, il reste encore de nombreuses zones d’ombre. « Ce genre de confrontations affectent vraiment notre compréhension de l’évolution des vertébrés et de leur diversité », affirme Lauren Sallan. « Il devient ainsi plus difficile de comprendre comment les espèces vont évoluer selon leurs écosystèmes. » Sources : Paleontology