Les braquages ont repris un mercredi. Un homme masqué conduit un fourgon volé dans les rues tranquilles d’Aspra Spitia, en Grèce-Centrale, désordre d’immeubles blancs aux fenêtres noires et carrées, tel un jeu de dominos tombé dans le golfe de Corinthe. Après s’être garé devant une agence de la Banque nationale grecque, il pénètre dans l’enceinte du bâtiment armé d’un fusil AK-47. Il ordonne au personnel d’ouvrir le distributeur automatique de billets, dérobe 150 000 euros, et s’empare ensuite de 100 000 euros dans la caisse, avant de prendre la fuite.

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Le jeune Vassilis Paleokostas

Nous sommes en février 2010 et l’économie grecque traverse une crise causée, selon bon nombre de gens, par l’avidité et la corruption au sein des banques. Un homme était en train de les faire payer. En octobre, il est soupçonné d’être responsable des braquages de deux banques au cours de la même journée. À Eginio, près de Thessalonique, un voleur à main armée pénètre dans la Banque nationale grecque en défonçant les fenêtres, puis réitère son geste à la Banque agricole située à peine 100 mètres plus bas dans la même rue, et s’esquive avec 240 000 euros.

Et puisque aucun blessé n’est à déplorer – fait inhabituel lors d’un braquage en Grèce –, les autorités tirent la conclusion suivante : « Il est fort probable que ce soit le fait de Vassilis Paleokostas. » En trente ans de délits, l’homme connu comme le Robin des Bois grec a dérobé des millions aux banques publiques et kidnappé des industriels pour distribuer généreusement de l’argent aux plus démunis.

Bien qu’il ait peu de choses en commun avec d’autres bandits célèbres – comme Ned Kelly ou Billy the Kid –, revendiquant le fait de n’avoir jamais blessé personne durant l’un de ses exploits, il n’en demeure pas moins l’un des hommes les plus recherchés d’Europe.

Un des ses anciens compagnons de cellules, Polykarpos Georgiadis, se rappelle de lui : « Les criminels arrachent les sacs à main des vieilles dames. Vassilis avait d’autres standards : c’est un bandit accepté socialement et un héros. » Mais tout comme Robin des Bois, Vassilis Paleokostas est méprisé par les autorités auxquelles il s’attaque. Elles font de lui le portait d’un terroriste violent, et les journalistes grecs ont jusque là été réticents à raconter son incroyable histoire.

L’enfant des montagnes

Vassilis Paleokostas est né en 1966 à Moschofito, un petit village de chaumières isolé au sommet d’une montagne enneigée, en Grèce-Centrale. Il grandit en regardant son père crier après les chèvres et idolâtre son frère aîné, Nikos. On surnommait les villageois « les héros », comme l’explique le Père Panayotis, le prêtre local, pas seulement parce qu’ils survivaient aux conditions de vie extrêmes des montagnes mais parce qu’ils le faisaient sans chaussures.

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L’Aghia Triada
Hiver dans les Météores
Crédits

« Vassilis est peut être un voleur, mais ce n’est pas un criminel », dit Panayotis. Dans ces régions, les voyous comme Vassilis – qui volent pour nourrir ceux qu’ils aiment – ne sont pas toujours haïs. Lorsque la neige était trop profonde, Nikos portait son petit frère sur ses épaules sur cinq kilomètres jusqu’à l’école la plus proche. Une fois arrivé, le prêtre le mettait devant le poêle pour faire fondre la neige qui le recouvrait avant que la leçon ne commence.

En 1979, la famille déménage pour s’installer dans la petite ville de Trikala. Nikos, 19 ans, avait quitté la maison pour trouver du travail sur un navire et Vassilis, 13 ans à peine, peinait à prendre la place de son frère. Son père, Leonidas Paleokostas, se souvient : « Il a travaillé pendant deux ans dans une usine de fabrication de fromage. C’était un garçon calme, très introverti. » À travers les carreaux de l’usine, Vassilis voit grandir l’économie grecque, dans laquelle les riches deviennent toujours plus riches, alors que le pays s’apprête à rejoindre l’Union européenne.

Il quitte son poste un après-midi et ne reviendra jamais. « Vassilis subissait l’exploitation capitaliste de ses patrons, il travaillait comme un esclave salarié de l’usine, raconte son ami Georgiadis. Alors il s’est retourné contre eux. » « En tant que villageois, il ne savait rien faire d’autre que voler pour survivre », dit le Père Panayotis, avec la générosité qui le caractérise envers son ancien élève.

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Entre 1979 et 1986, Vassilis et son frère ainé Nikos, qui n’est pas resté en mer très longtemps, sont présumés coupables de 27 vols à mains armées – pour la plupart des vols de magnétoscopes. Vassilis découvre l’électricité et devient accro aux films d’action. Il reste parfois éveillé des nuits entières, captivé par les combats de Rocky, les muscles de Schwarzenegger et l’évasion d’Alcatraz de Clint Eastwood.

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L’Artiste
Costas Samaras en prison
Crédits : Jeff Maysh

C’est à cette époque que le jeune voleur rencontre son complice et maître, celui qui va grandement influencer son existence. « Vassilis n’était qu’un petit délinquant », explique Dimitros Gravanis, le chef de police en civil de la ville, « jusqu’à ce qu’il rencontre Costas Samaras, dit “L’Artiste”. »

Plus âgé et plus avisé que les garçons Paleokostas, Samaras est un criminel en herbe, ancien élève d’une école de design qui élabore ses braquages sur un carnet à dessins. Ensemble, les frères Paleokostas et L’Artiste passent au niveau supérieur, en braquant des bijouteries et des banques.

Gravanis se souvient de leur premier cambriolage à trois : « Vassilis a escaladé le sommet d’une colline et a tiré un coup de fusil pour attirer l’attention des policiers. Mais ils avaient bloqué leur porte avec un énorme four industriel. » Les policiers perdent des minutes cruciales avant de parvenir à sortir du poste de police, et lorsqu’ils y arrivent enfin, L’Artiste et Nikos sont déjà en train de braquer la bijouterie du coin.

« Quand nous sommes enfin montés dans les voitures, on s’est aperçu qu’ils avaient mis des clous sur la route et nous avons crevé. À partir de ce moment-là, mon seul objectif était de voir ces types en prison. » L’enquêteur moustachu est un penseur, qui préfère résoudre une affaire en utilisant sa tête plutôt que passer un suspect à tabac pour obtenir des aveux.

« Je me suis pas mal torturé sur l’affaire des frères Paleokostas, se souvient-il. Je travaillais la nuit pendant des heures sur cette affaire, et quand je rentrais chez moi, à 7 h 30, ma femme partait travailler. » Pourtant, Paleokostas court toujours, et pour une bonne raison : il donne son argent aux plus démunis. « Il disait à un agriculteur : “Tue un cochon pour moi, j’ai faim”, et au lieu de lui donner 10 drachmes, il lui en donnait 1000 », explique Gravanis. Ainsi, les braquages de banques s’enchaînent dans les années 1980 et Vassilis distribue ses recettes à quiconque lui offre un abri. « Vassilis n’était qu’un gamin qui voulait impressionner son frère Nikos, ajoute Gravinis, et qui mourait d’envie de participer à un vrai braquage. »

Avec l’inflation grandissante dans le pays, le prix d’une bière quadruple entre 1985 et 1992. La population devient de plus en plus méfiante à l’égard du gouvernement et critique vivement la corruption des banques publiques. Cela ne fait qu’augmenter le nombre de partisans des Paleokostas, les frères hors-la-loi.

« Les petits voleurs sont pendus. Devant les grands voleurs, on enlève le chapeau. » Proverbe grec

S’ensuit alors un long jeu du chat et de la souris entre policiers et braqueurs. En avril 1990, Paleokostas est arrêté alors qu’il tente de faire sortir son frère de la prison de Larissa en enfonçant un mur avec un char volé. Il est emprisonné, mais pas longtemps. En janvier 1991, alors que George Bush lance l’Opération Tempête du désert et des frappes aériennes contre l’Irak, Vassilis s’évade de la prison de Chalkida. Il escalade un mur à l’aide de draps. Mais malgré les richesses accumulées, il préfère vivre tel un paysan, en achetant uniquement ce dont il a besoin. Il se fiche des voitures tape-à-l’œil, excepté pour ses évasions. Un de ses biens les plus chers est un mystérieux crucifix en or qu’il porte autour du cou. Celui-ci aurait plus tard un rôle très important dans une évasion réussie.

Ses règles du jeu

En juin 1992, sur les falaises des Météores, un piton rocheux incrusté de monastères surplombant les toits en terre cuite de Kalambaka, les voleurs planifient le braquage le plus osé qu’ils aient entrepris jusqu’alors. La région, habitée sans interruption depuis 50 000 ans, est depuis toujours un refuge pour ermites, bandits et fugitifs tels que Paleokostas et sa bande. C’est une petite ville – la banque se situe à 500 mètres seulement du commissariat le plus proche – mais les voleurs semblent se réjouir à l’idée de faire passer les policiers pour des idiots.

Alors que Nikos regarde fixement à travers ses jumelles, L’Artiste esquisse la place de l’hôtel de ville sur un bout de papier. Vassilis s’écrie « Listia ! » (« Sortez ! ») au moment où les trois hommes font leur entrée dans la banque, en costumes et lunettes de soleil, équipés d’armes automatiques. Tandis que L’Artiste barre le passage aux policiers à l’aide d’un camion volé, le caissier déclenche l’alarme silencieuse avant d’ouvrir le coffre-fort sous la menace d’une arme.

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Nikos Paleokostas
Arrêté en 2008

L’économie grecque est prospère et ses banques regorgent d’argent liquide emprunté. L’intérieur du coffre-fort renferme bien plus que ce à quoi les voleurs s’attendaient. Vassilis bénit le seigneur et commence à remplir son sac marin. Puis les sirènes retentissent. Alors que la bande prend la fuite dans une Audi volée vers les montagnes de leur enfance, les policiers les talonne.

Vassilis jette des poignées de billets par la fenêtre. C’est le chaos dans les rues, où s’abat une pluie de billets de banque sur les habitants de la ville. En quelques minutes, 125 millions de drachmes (plus de 450 000 euros à l’époque) ont été dérobés sous le nez des autorités. Ce braquage représente le vol d’argent liquide le plus important de l’histoire de la Grèce, et peut-être le seul qu’on ait partagé avec les passants.

« Ils ont volé la Nissan d’un habitant pour se déplacer dans les montagnes », se souvient Gravanis. Mais Paleokostas l’a ensuite rendue à son propriétaire, avec 150 000 drachmes (environ 550 euros) planqués sous le tapis. « Cela paraît incroyable, mais la voiture avait même été nettoyée », affirme l’enquêteur. La population locale se souvient encore très bien de Paleokostas. « Il ne parlait pas beaucoup », se remémore affectueusement une dame âgée dans un café. « Mais il avait toujours un sourire espiègle. »

Les activités du gang forcent les banques à renforcer leur sécurité, et les cartes de crédit commencent à remplacer l’argent liquide. Il était donc peu probable que la prise de Kalambaka se reproduise. C’est peut-être pour cette raison que Paleokostas cesse tout cambriolage pendant un certain temps. Certains disent qu’il aurait lancé à cette période sa propre usine de production de fromage en Bulgarie, quand d’autres affirment qu’il aurait ouvert des boutiques aux Pays-Bas. Ce qu’on sait de source sûre, c’est que, quelque temps après, il s’est mis à enlever de puissants industriels en échange de rançons.

~

Le vendredi 15 décembre 1995, à 8 h 15, le milliardaire Alexander Haitoglu quitte sa superbe villa de Thessalonique et grimpe dans sa voiture pour se rendre à l’usine dont il est propriétaire, où les travailleurs fabriquent du halva, un dessert grec traditionnel fait à base de graines de sésame et de miel. Le véhicule du milliardaire est forcé de quitter la route et les frères Paleokostas embarquent l’individu dans une Jeep puissante. Vassilis demande une rançon de plus de 260 millions de drachmes pour sa libération (ce qui équivaut à l’époque à 900 000 euros, et 1 500 000 euros aujourd’hui).

Le puissant homme d’affaires admettra plus tard : « C’était un enlèvement bien préparé. Le comportement de mes ravisseurs n’était pas violent. Je n’ai pas eu peur pour ma vie. En fait, j’ai apprécié les discussions très riches que j’ai eues avec eux. » À sa libération, on pouvait lire en gros titre d’un journal : « Ils ont mangé un halva à 260 millions ! »

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Les gros titres d’un journal grec
Édition du 19 décembre 1995

En guise de réponse, les autorités grecques offrent l’incroyable récompense de 250 millions de drachmes pour la capture de Paleokostas, traitant les ravisseurs de « professionnels sans pitié, pratiquant le crime organisé d’une ampleur inédite ». On dit qu’il aurait toutefois poursuivi sa routine de Robin des Bois, en redistribuant une partie de la rançon obtenue à des agriculteurs de la région et à des sans-abris. « Il a donné 100 000 drachmes à des orphelines qui devaient se marier », raconte son père.

À cette époque, dans les villages grecs, une femme ne pouvait se marier sans une dot, et dans certains villages, c’est encore le cas aujourd’hui. Mais, comme toujours, Paleokostas distribue plus d’argent que nécessaire. Si les dires de son père sont exacts, 100 000 drachmes représentent une énorme somme. Paleokostas passe plus de trois ans à échapper à la loi, vivant comme un fugitif dans les hautes collines.

De temps à autre, portant un déguisement, il sort faire une virée dans une voiture volée. Gravanis, l’ancien enquêteur, se souvient : « Nous avons finalement attrapé Vassilis après qu’il ait eu un accident de voiture. Il était sous l’emprise de stupéfiants, il avait fumé et causé un accident. » Les curieux se précipitent pour appeler une ambulance alors que le voleur les supplie : « Ne leur dites pas qui je suis. Je suis Vassilis Paleokostas ! » Le 20 décembre 1999, le centre d’appels d’urgence contacte la police : « Nous avons un patient blessé à la tête, il affirme être l’homme le plus recherché du pays. »

Derrière les barreaux

La prison de Corfu ressemble à une tanière de bandits comme on en voit dans les films, un tas de pierres sombres perché au sommet d’une falaise au-dessus de la mer Ionienne. On y sert de la bouillie, les cellules en pierres froides sont surpeuplées et dès son arrivée, on rappelle à Vassilis Paleokostas son enfance honteuse, le mettant pieds nus. « Il faut que je trouve des chaussures pour mes camarades », dit-il à un prédicateur en visite, qui l’aide à récolter des centaines de paires de chaussures pour les prisonniers qui en sont privés.

« Rangez vos armes », dit-il à ses gardiens lorsque Paleokostas finit par venir à bout des barreaux. « Je veux régler ça d’homme à homme. »

Mais il ne fait pas que des bonnes actions. En mai 2003, des gardiens trouvent un plan détaillé de la prison dans sa cellule et le font immédiatement transférer à la prison de haute sécurité de Korydallos, près d’Athènes. Korydallos, une des prisons les plus connues en Europe, abrite des assassins, des criminels de guerre et des terroristes. Un peu plus de six ans après le début de sa peine de 25 ans de prison pour enlèvement et vols à mains armées, Paleokostas se retrouve enfermé avec Alket Rizai, tueur à gages albanais, et c’est le début d’une amitié invraisemblable entre les deux hommes.

« Il nous a fallu vingt jours pour préparer notre évasion », m’explique Rizai par téléphone, incarcéré à la prison de Patras. « Vassilis voulait à tout prix s’évader », témoigne celui qu’on surnomme « le surveillant », un caïd grec à la réputation redoutable : « Par exemple, j’ai découvert que le crucifix en or qu’il portait autour du cou pouvait dévisser des menottes. Et un jour, j’ai trouvé une lime cachée dans un paquet de spaghettis. » Au lieu de confisquer la lime, le surveillant pénitentiaire laisse Paleokostas scier ses barreaux pendant des mois et prend plaisir à vérifier son avancement en cachette.

« Rangez vos armes », dit-il à ses gardiens lorsque Paleokostas finit par venir à bout des barreaux. « Je veux régler ça d’homme à homme. » Lorsque Paleokostas sort de sa cellule et arrive à l’angle de la cour, sur la pointe des pieds, le surveillant l’attend. Ils échangent des coups sous les projecteurs, jusqu’à ce que le prisonnier morde la poussière. Le surveillant s’explique : « Il s’est servi de la pauvreté pour justifier ses crimes. Il commençait à croire au mythe de Robin des Bois. »

~

Le 4 juin 2006, Paleokostas a déjà barré 2358 jours sur son calendrier depuis qu’il est en prison. À 18 h 15, près d’Athènes, un pilote professionnel d’hélicoptère du nom de Karikis embarque dans son Eurocopter AS355N blanc. L’ancien pilote de l’armée effectue des vols touristiques pour la compagnie grecque Airlift, mais ce jour-là, cinq minutes après le décollage, un des deux passagers qu’il transporte plaque le canon d’un pistolet contre sa nuque. L’homme explique que l’excursion touristique est terminée. Il dit être Nikos Paleokostas. Et il va sauver son frère.

Dix minutes plus tard, l’hélicoptère approche de la prison de Korydallos et ralentit sa vitesse à 112 km/h. « Nous avons songé à embaucher un pilote, mais un pilote qui a peur, c’est mieux, explique Rizai, car un pilote qui a peur est prêt à prendre plus de risques. » Les gardiens, pensant qu’une personne de l’administration pénitentiaire arrive pour une visite d’inspection, ajustent leurs uniformes. Tandis que l’hélicoptère atterrit dans la cour devant l’aile E, la déflexion de l’air vers le bas crée une tempête de poussière épaisse et brune. Le pilote s’écrie : « Ils ont des grenades ! Ils ont des explosifs ! » Par-dessus le vrombissement aigu des turbines, un gardien hurle : « Évasion ! Évasion ! » L’évasion avait commencé.

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Alket Rizai
Arrêté en 2009

Quelques minutes plus tard, Vassilis Paleokostas et Rizai se ruent vers l’hélicoptère qui amorce son décollage. Les gardiens pointent leurs armes dans leur direction mais se gardent de tirer : la prison est située dans une zone résidentielle entourée d’orangers et des enfants jouent au ballon contre les murs de la prison. « Le but d’une évasion est de ne laisser aucune trace et de dire “merci et bonjour chez vous” en partant ! » plaisante Rizai.

À Skisto, au nord d’Athènes, l’hélicoptère se pose dans un cimetière désert. « On a réussi ! » s’exclame Vassilis en embrassant son frère.  Il fait cadeau d’un petit chapelet au pilote pris de panique pour l’apaiser, et enlève la béquille d’une moto d’un coup de pied, avant de démarrer. Rizai fait de même. En un mouvement de poignet, les deux motos rugissent et Paleokostas et Rizai font route vers le nord, sur le long chemin de la liberté. Ils portent toujours leurs vêtements de prisonniers.

Le dimanche soir, le commissariat de police de Trikala est toujours vide. Mais cette nuit-là, Dimitrios Gravanis travaille dur sur une importante affaire. Lorsque le télex se met en marche, Gravanis arrache le rapport. Il regarde par la fenêtre et se met à rire. Le rapport du ministère de l’Ordre Public indique : « Nous pensions être tout proches de Nikos Paleokostas. Mais en fait, il semblerait qu’il était encore plus proche de nous. »

La source d’inspiration

Le trajet en voiture entre Trikala et Korydallos, vers le sud, dure quatre heures. En filant à travers les rues d’Athènes, en 2014, les problèmes économiques du pays semblent invisibles. Dans le centre, la place Syntagma fourmille d’utilisateurs d’iPhone et de personnes buvant des Mc Frappés. Pourtant, la nuit, quelques athéniens sont obligés de brûler du bois pour se chauffer, dégageant une fumée toxique qui plane au-dessus du Parthénon.

À l’intérieur de la prison de Korydallos, l’air est encore plus épais, empli de fumée de cigarettes, d’eau de javel et de sueurs froides. Les prisonniers de l’infirmerie ont entamé une grève de la faim. Les responsables ont averti que la violence pouvait éclater à tout moment dans les prisons grecques, qui fonctionnent à la limite de leur capacité. « Le système est en train de s’effondrer », reconnaît Spyros Karakitsos, chef de la fédération grecque des employés de prison.

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Prison de Korydallos
District du Pirée
Crédits

On me signale que je suis le premier journaliste autorisé à entrer et on me prévient que je pourrais être une cible de choix pour les détenus. Le bureau du surveillant se situe tout au bout du service de psychiatrie de la prison, et ses murs sont d’un jaune blafard. Un slogan écrit en grec y est encadré, sur lequel on peut lire : « Il n’est pas nécessaire d’être fou pour travailler ici, mais ça aide. » Le surveillant fait entrer un témoin pendant notre entretien. Il me présente un homme bien mis, ses cheveux poivre et sel impeccablement coiffés, vêtu d’un bas de survêtement Nike gris et d’une veste bleue, qui joue avec un chapelet pendant qu’on discute.

« J’ai eu tous les voleurs de la région ici, même Costas Samaras, L’Artiste », se vante le surveillant. « L’Artiste était très intelligent, soupire-il. Je me souviens, un jour il a fabriqué des pistolets en bois, lors d’un atelier de menuiserie, pour tenter de s’évader. Ils avaient l’air tellement vrai, on pouvait même les charger ! » À coté de moi, l’homme cesse de jouer avec son chapelet et marmonne quelque chose au surveillant. Il poursuit : « Des piles. L’Artiste avait enlevé le plastique qui entourait deux piles et les avait chargées dans le cylindre. Enfoncées dans le visage d’un gardien, on aurait dit deux balles ! »

Le surveillant explique qu’il n’était pas en service au moment de l’évasion par hélicoptère, et que L’Artiste leur avait certainement inspiré ce scénario. Il partageait la même obsession pour le cinéma et avait rassemblé dans sa cellule une véritable encyclopédie des films de prisons, de À nous la victoire à La Grande illusion. Je demande quelle a été l’implication de L’Artiste dans l’évasion en hélicoptère, car on dirait un plan tout droit sorti de son carnet à dessins. Le surveillant se penche en arrière sur sa chaise, croise ses mains derrière la tête et me dit, visiblement très content de son effet : « Vous pouvez lui demander vous-même. L’Artiste est assis juste à côté de vous. »

À mes cotés, le partenaire de crime de Robin des Bois sourit poliment et m’accorde un entretien rare. Lorsque je lui demande si Paleokostas est réellement un Robin des Bois, L’Artiste répond sans équivoque :

Alors que le fugitif se sert un verre d’alcool frelaté et s’installe pour regarder un DVD, une équipe du GIGN enfonce la porte.

« Oui, lui et son frère s’arrêtaient pour donner de l’argent volé aux immigrés dans la rue. Lorsqu’on était dans la voiture après avoir pris la fuite [de Kalambaka], ils ont dit à la radio qu’on avait laissé 90 millions ! se souvient-il. Vassilis a plaisanté et a dit : “On y retourne ?” » Il parle fièrement de son ancien protégé. « – J’étais son mentor. Je lui ai appris à conduire une voiture, à faire du vélo, à utiliser une arme… et à braquer une banque. — Et qu’est-ce qui vous a donné envie de commettre ces crimes ? — Les films. » Avant d’être raccompagné à sa cellule, L’Artiste me sert la main et se vante de son exposition de tableaux à venir. « Va voir mon profil Facebook ! » dit-il avec entrain.

En cavale

Après leur évasion de prison en 2006, Alket Rizai et Nikos Paleokostas sont capturés rapidement, mais Vassilis, lui, se jure de continuer. Le 9 juin 2008, il enlève George Mylonas, milliardaire et magnat de l’aluminium qui a scandalisé les plus démunis du pays en déclarant : « Les travailleurs doivent se serrer la ceinture. »

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Vassilis Paleokostas
Lors de son arrestation en 2008

À propos de ses ravisseurs, Mylonas déclare : « Ils étaient polis et m’ont traité avec respect. » Paleokostas lui achète même le journal tous les matins et lui demande d’un ton léger : « Quoi de neuf, Georgi ? » avant de le laisser rentrer chez lui au volant d’une BMW volée. On rapporte que le montant de la rançon exigée est de 12 millions d’euros. Finalement, les autorités grecques retrouvent Paleokostas dans la maison où Mylonas avait été détenu.

Là, le 2 août 2008, alors que le fugitif se sert un verre d’alcool frelaté et s’installe pour regarder un DVD, une équipe du GIGN enfonce la porte et pénètre dans la maison. Les policiers trouvent la copie DVD du film La Rançon et de Heat, le film avec Al Pacino, qui met en scène deux braqueurs de banques vétérans qui échappent à la police. Cela faisait 791 jours qu’il était en cavale lorsqu’il a été arrêté, et les policiers étaient on ne peut plus heureux.

Un télégramme officiel envoyé par le consul américain de Thessalonique au secrétaire d’État à Washington, rendu public ultérieurement par Wikileaks, indique : « La capture relativement rapide de Vassilis Paleokostas, un des criminels les plus célèbres du pays, était nécessaire pour remonter le moral des policiers et redorer l’image publique de la police grecque. » Malcom Brabant, correspondant en Grèce pour la BBC à l’époque, écrit : « Pour la première fois en presque vingt ans, les policiers grecs ont eu le dernier mot dans le long combat de ruse qu’ils ont mené face aux frères Paleokostas. »

Personne ne sait de quelle façon Paleokostas a dépensé les millions de la rançon, mais lors de son audience préliminaire à Athènes en janvier 2009, face aux nouvelles accusations d’enlèvement et de vols à mains armées, une foule se rassemble devant le tribunal. Agriculteurs, paysans et anarchistes scandent à l’unisson : « Mort aux vaches ! Libérez Paleokostas ! » Un groupe de jeunes femmes envahit la salle d’audience, tel « un fan club d’adolescentes devant leur chanteur préféré », écrit le tabloïd hebdomadaire Espresso.

À peu près au même moment, la plantureuse petite amie d’Alket Rizai, Soula Mitropia, fait également sensation dans la salle d’audience. Au moment où le verdict de 25 ans de réclusion tombe pour Rizai, elle éclate en sanglots de façon théâtrale et le serre dans ses bras. Et profite d’un moment d’inattention pour glisser une mystérieuse montre dans sa poche.

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Soula Mitropia

Le juge renvoie Paleokostas dans sa cellule de Korydallos, tout comme Alket Rizai, dans l’attente du verdict. Le bandit, vaincu, déclare au tribunal : « J’ai joué et j’ai perdu. La police a gagné. » Dans les rues d’Athènes, des anarchistes pleurent la fin d’une longue série de victoires remarquables. Dans le théâtre grec, une péripétie désigne un changement soudain de l’action, un brusque retournement de la situation dans laquelle se trouve un personnage. Aristote écrivait qu’il s’agit de l’un des moments les plus puissants d’une pièce.

Ce qui s’est passé le 22 février 2009 allait rendre Vassilis Paleokostas tristement célèbre dans le monde entier. L’événement allait entraîner la création d’une page Facebook, qui compte plus de 50 000 membres et a même inspiré les paroles d’une chanson : « Vassilis est intouchable et ses techniques d’évasion sont imbattables. Vassilis, tu es insaisissable. »

Et de deux

C’est une matinée ordinaire pour les surveillants qui contrôlent les caméras de sécurité. Paleokostas soulève des poids dans la salle de gym de la prison et fait du jogging dans la cour, pendant que Rizai prend des paris footballistiques et mise sur ses favoris. Rizai se souvient : « Je suis le genre de personne qui a de l’intuition. Je ressens les choses, et quand quelque chose de bon est sur le point de se produire, je peux le sentir. » À 15 h, Mitropia l’appelle sur la montre-téléphone qu’elle a glissée dans sa poche au tribunal. C’est l’heure.

Au moment où la portière de l’hélicoptère se referme, trois gardes lèvent leur pistolet-mitrailleur MP5 et ouvrent le feu.

La sirène d’urgence de Korydallos retentit comme un violon triste alors que les gardiens donnent l’ordre aux prisonniers de regagner leurs cellules. Il est 15 h 45, la veille du jour où le procès de Paleokostas doit débuter. Loin au-dessus d’eux, un surveillant au poste d’observation sent enfler le vrombissement d’une pale de rotor, reconnaissable entre tous. Lorsque l’hélicoptère descend vers la troisième aile, le gardien s’empare de son pistolet automatique et déclenche l’alarme. Ce n’est pas un exercice.

Et cette fois, ils sont prêts à tirer pour tuer. L’hélicoptère a été détourné de la compagnie Interjet, réputée pour assurer à ses clients des « sorties astucieuses ». Une certaine Madame Alexandrova, une femme séduisante, embarque à bord d’un hélicoptère AS355N à l’aéroport d’Athènes. Elle sort une grenade de son sac à main et s’adresse au pilote : « On va chercher les petits. Direction la prison de Korydallos ou t’es un homme mort. » Au moment où l’hélicoptère stationne au-dessus de la prison, elle brandit une mitrailleuse et envoie une échelle de corde à Rizai et Paleokostas. Cette femme, dit-on, c’est Mitropia. Un garde désespéré se précipite sur les détenus qui tentent de s’échapper, mais un Albanais lui barre la route et brandit une longue broche à kebab en le menaçant : « Recule ou je te l’enfonce ! » « On y va ! » crie Paleokostas, et le pilote manœuvre à toute vitesse pour s’élever dans les airs.

Au-dessous d’eux, la prison ressemble à une foule de supporters de foot, les détenus les acclament et crient de joie. Mais au moment où la portière de l’hélicoptère se referme, trois gardes lèvent leur pistolet-mitrailleur MP5 et ouvrent le feu vidant leurs chargeurs dont les balles s’écrasent dans le ventre de l’appareil. L’une d’elles se loge dans le réservoir et une autre sectionne la conduite de carburant. Du kérosène jaillit dans la cabine de pilotage, où le pilote murmure une prière. Au même moment, une femme qui se trouve dans un appartement non loin filme la scène à l’aide d’une caméra vidéo.

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Évasion spectaculaire
Le 22 février 2009

« On a encore réussi ! jubile Paleokostas. Et même s’ils nous ont tiré dessus, on n’a tiré sur personne. » Mais l’aiguille qui indique le niveau de carburant s’effondre, obligeant l’hélicoptère à atterrir d’urgence. À Trikala, l’enquêteur Gravanis découvre la nouvelle de la seconde évasion sur la machine télex de la police. « Je n’ai pas pu m’empêcher de rire », dit-il. Les feuilletons grecs sont interrompus dans tout le pays pour diffuser l’information de l’évasion. Pour la seconde fois, un pays tout entier est captivé par les aventures de Vassilis Paleokostas.

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Paleokostas, Rizai et Mitropia sont tous les trois en cavale. Une nuit, dans un village près de Koziakas, aux environs de Trikala, un étranger frappe à la porte d’une famille démunie. Le père souffre de graves problèmes de santé et n’a pas les moyens de payer son traitement. L’homme jette dans la maison une enveloppe contenant 10 000 euros et disparaît dans la nuit. Mais les policiers se rapprochent. Dans une lettre envoyée aux médias, Paleokostas se plaint : « Partout où je regarde, il y a des centaines de policiers, sans parler des agents en civils. Des douzaines de chasseurs de têtes qui rodent dans les montagnes… armés jusqu’aux dents avec une artillerie de guerriers, une lueur menaçante et insensible dans les yeux. »

Selon les Services de renseignement, le fugitif a « un faible » pour les capacités tout-terrain de la Volkswagen Touareg, et en vole fréquemment pour traverser les autoroutes et les montagnes sans difficulté. Sur son autoradio, il aime écouter des morceaux de guitare acoustique grecque pendant qu’il distance les policiers pour continuer à commettre ses crimes.

La traque

Au cours des vingt dernières années, la CIA a opéré une brigade anti-terroriste secrète à Athènes. On les appelle les Invisibles, une brigade d’élite composée de quinze officiers du renseignement grec et américain, chargée de déloger les terroristes et les « criminels très spéciaux ». En 2009, Vassilis Paleokostas devient leur cible numéro un. Cachés derrière une fausse adresse professionnelle près de l’hôtel cinq étoiles Divani Caravel dans le centre d’Athènes, les Invisibles aident la police grecque à se rapprocher de sa proie, grâce au soutien financier américain. Ses jours sont certainement comptés.

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Unité anti-terroriste grecque

Le 31 mars 2009, à 14 h 03, un braquage de banque peu commun est en train de se dérouler à Trikala, la ville dont Paleokostas est originaire. Trois voleurs – deux hommes et une femme – font irruption dans la banque Alpha. Armés de pistolets et d’un fusil à canon scié, les voleurs portent des bas sur la tête et des casques de motos. Ils crient : « C’est un braquage ! Les mains en l’air ! »

L’invraisemblable trio retient sept employés et quinze clients, vide le coffre de 250 000 euros avant de prendre la fuite sur trois motos volées. Dans un article intitulé « Braquage sexy », un journal grec rapporte que la police considère qu’il s’agit « des fugitifs Vassilis Paleokostas, Alket Rizai et de leur complice de sexe féminin, une “Lara Croft blonde” ».

Peu de temps après, Rizai et sa petite amie sont arrêtés. Mitropia est reconnue coupable du détournement d’hélicoptère et accusée d’être la mystérieuse blonde armée d’une mitrailleuse à bord de l’appareil – ce qu’elle nie fermement. Mais impossible pour les Invisibles de mettre la main sur Paleokostas. Une chasse à l’homme interminable débute. Des policiers lourdement armés écument les campagnes avec des hélicoptères détecteurs de chaleur, survolant les montagnes où Vassilis volait du bétail quand il était enfant et où les familles de paysans survivent aujourd’hui comme elles peuvent, sur le sol rocailleux.

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Cinq ans après son évasion spectaculaire, Vassilis Paleokostas, aujourd’hui âgé de 48 ans, est toujours en cavale, et les casses continuent. La police a failli découvrir sa planque une fois seulement, alors qu’il tentait de louer des films dans un magasin de location de DVD. Le 14 avril 2009, une équipe de quinze policiers en civil dans trois voitures sans plaque d’immatriculation le poursuit le long de la route côtière d’Alepohori, dans le sud de la Grèce. Dans un virage, ils pointent leurs armes automatiques sur le fugitif, prêts à tirer. « J’ai foncé », écrit Paleokostas dans sa lettre ouverte adressée aux médias. « J’ai accéléré dans la descente, les balles dansaient dans la voiture. Ces types ont ouvert le feu et ont tiré plus de 150 balles en 15 secondes. »

Tout le monde en Grèce a sa théorie sur l’endroit où il se trouve aujourd’hui.

Le voleur et fugitif souligne que durant toutes ces années, lui, au contraire, n’a jamais tiré sur personne. Il signe la lettre de son empreinte digitale, à l’encre bleue. Quelques mois après l’envoi de la lettre, le 24 juin 2010, les autorités déclarent avoir trouvé l’empreinte digitale de Paleokostas sur une lettre piégée envoyée pour assassiner le ministre de l’Ordre Public, Michalis Chrysochoidis. La lettre explose dans les mains de son assistant, George Vassilakis, 52 ans, le tuant sur le coup. Paleokostas est immédiatement désigné comme terroriste et assassin, et une prime de 1,4 million d’euros est promise à quiconque mettra la main dessus.

Ses partisans, parmi lesquels George Ras, 23 ans, originaire de la banlieue d’Exarcheia à Athènes, affirment que c’est un coup monté : « Comment peut-on trouver une empreinte digitale sur une bombe qui a tué un homme et a fait exploser les murs ? » Depuis la crise économique de 2010, avec les émeutes, les privations et le chômage qui ont suivi, les rangs des anarchistes et des militants anticapitalistes se sont renforcés. Exarcheia est leur bastion et les affiches pro-Paleokostas et les graffitis sur les murs montrent que la population locale soutient ardemment les braquages. Le bandit est devenu le symbole d’une époque agitée, comme a pu l’être John Dillinger durant la Grande Dépression aux États-Unis, ou Jesse James quand la guerre civile américaine a éclaté, en 1861.

En fin d’année dernière, la police a cru mettre la main sur lui une fois de plus, dans une ferme des régions montagneuses de Kozani, quelque part au nord de Trikala. Après une fouille approfondie du domaine, les policiers n’ont trouvé que des billets de banques dont les numéros de série correspondent à ceux de l’argent des rançons et des braquages de banque, ce qui suggère qu’il est toujours en cavale et qu’il continue de distribuer de l’argent aux agriculteurs. Dans les villages, certaines rumeurs disent que Paleokostas a une petite amie étrangère et qu’il est père d’un petit garçon né il y a peu. Tout le monde en Grèce a sa théorie sur l’endroit où il se trouve aujourd’hui et, tel un Elvis grec, il est souvent « aperçu ».

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Est-ce Vassilis Paleokostas ?
Vidéosurveillance d’une station service

De nombreux Grecs pensent que le hors-la-loi est protégé par des moines et qu’il trouve refuge dans les monastères qui siègent, tels des châteaux de contes de fées, sur les sommets enneigés. En octobre 2010, durant la dernière série de braquages, un homme ressemblant à Paleokostas a été aperçu sur des caméras de surveillance dans une station service. Si c’est bien lui, il semblerait qu’il ait eu recours à la chirurgie esthétique.

Des perruques et du maquillage trouvés dans une cachette laissent penser que Vassilis pourrait même se transformer en femme. Les médias l’ont récemment surnommé « le fantôme », tandis que les gens du coin l’appellent simplement « le roi des montagnes ».

Dimitris Gravanis, l’enquêteur aujourd’hui à la retraite, me montre l’enregistrement de la station service dans un café, à Trikala, et déclare : « Je n’arrêterai jamais de chercher Vassilis. La question n’est pas de savoir s’il va frapper de nouveau, le tout est de savoir quand. »


Traduit de l’anglais par Claire Sepulcre, d’après l’article « The Unstoppable », paru dans BBC News Magazine. Couverture : L’Aghia Triada, dans la chaîne des Météores. Création graphique par Ulyces.