Christopher Wylie a troqué le rose contre le peroxyde d’hydrogène. Huit mois après le début du scandale Cambridge Analytica, le lanceur d’alerte et développeur canadien a changé de couleur de cheveux mais n’a rien perdu de sa verve. Sur la grande scène du Web Summit de Lisbonne, ce 6 novembre 2018, Wylie est venu non seulement raconter son histoire, mais aussi appeler à une régulation urgente du Web. « Lorsque vous allez chez le médecin ou l’épicier, vous vous sentez en sécurité. Pourquoi ? Parce que c’est un environnement régi par des règles. Il faut qu’on régule ce putain de Web ! » scande-t-il par-dessus les applaudissements.

Celui qui compare volontiers les Géants du Web à de nouvelles puissances coloniales « qui colonisent notre société armés de leur technologie rutilante » n’hésite pas à réaffirmer que Facebook savait tout des agissements de la société américaine. La plateforme vient d’ailleurs d’écoper d’une nouvelle amende de 500 000 livres au Royaume-Uni suite au scandale. Si c’est moins qu’une piqûre de moustique pour la firme de Mark Zuckerberg, saura-t-elle retrouver la confiance de ses utilisateurs ?

Un dîner presque parfait

Dans le décor clinquant du Berkeley Hotel de Londres, le style d’Alexander Nix jure par sa sobriété. Ce jour de janvier 2018, le patron de Cambridge Analytica, une agence de communication britannique, porte un par-dessus beige ouvert sur un costume gris. Ses cheveux ondulés sont plaqués vers l’arrière comme s’il avait voulu les discipliner. Flanqué de son responsable des campagnes politiques, Mark Turnbull, dont les habits sont tout aussi dépouillés, cet homme de 42 ans se tient droit sur sa chaise, les mains à plat au-dessus de la serviette qui recouvre délicatement ses genoux.

À travers les volets à claire-voie blancs, la lumière des guirlandes lumineuses du perron se fraye un chemin jusqu’à la table en aluminium. Son miroitement participe à l’éclairage tamisé de la pièce. En public, les gestes de Nix sont précis, son discours calibré. Mais ce soir, convaincu de se confier à deux clients, il passe à table : « Nous allons tout filmer, flouter les visages de nos gars, et poster la vidéo sur Internet », lance-t-il sans savoir que c’est précisément le procédé qu’emploient à cet instant ses interlocuteurs.

Alexander Nix
Crédits : Sam Barnes/Web Summit

Le PDG parle en réalité devant la caméra cachée de journalistes de Channel 4 qui se font passer pour des Sri Lankais prêts à tout pour faire gagner leur candidat aux prochaines élections. Avant le dîner, par téléphone, Nix leur avait présenté Cambridge Analytica comme « la plus grande et la meilleure agence de communication politique au monde ». Il avait aussi fait une allusion à ses méthodes : « Nous employons différents moyens, dans l’ombre, et je suis pressé de construire une relation secrète de long-terme avec vous. » Au Berkeley Hotel, il va se montrer plus précis.

« Ce qui pourrait être efficace, ce serait simplement d’aller voir la personne en question, de lui proposer un marché trop beau pour être vrai, et de faire en sorte que ce soit enregistré », ose-t-il sans sourciller. « Ce genre de tactiques est très efficace : vous avez une preuve de corruption instantanément. » Le quadragénaire propose aussi d’ « envoyer des filles chez le candidat ». Car, « même si cela peut paraître horrible à dire, ces choses-là n’ont pas besoin d’être vraies, ce qui compte c’est qu’elles soient crues. » En plus de ces techniques aussi anciennes qu’illégales, Cambridge Analytica offre une stratégie moderne et massive : elle collecte des données personnelles sur les réseaux sociaux pour mieux cerner les préférences d’un électorat.

« Si vous récoltez des données sur des gens, si vous les “profilez”, cela vous donne des éléments que vous pouvez utiliser pour segmenter la population et lui délivrer des messages sur des questions qui l’intéresse », décrit le responsable des données de Cambridge Analytica, Alex Tayler, lors d’une autre réunion filmée en caméra cachée par Channel 4. « Nous avons utilisé cela en Amérique, en Afrique. » Mark Turnbull prend le relais : « Au Mexique, en Malaisie, au Brésil, en Australie et en Chine. » Il n’y a qu’à se servir dans les énormes banques d’information de Facebook.

En 2014, un doctorant en mode canadien de 24 ans a élaboré un plan afin de siphonner les profils Facebook de millions d’Américains de manière à dresser leur profil psychologique et politique. Passé par Londres pour y étudier l’économie, Christopher Wylie l’a proposé au parti anglais pour lequel il travaillait, les Liberal Democrats (Lib Dems). Au sein de cette formation à la popularité en charpie, personne n’a vu l’intérêt. Mais un de ses membres a présenté le jeune homme à la direction du SCL Group. Le responsable des campagnes électorales de ce dernier, Alexander Nix, a offert à Wylie « une totale liberté » de travail. Seul bémol, son supérieur s’appellerait Steve Bannon.

Steve Bannon
Crédit : Gage Skidmore

Ainsi, ce jeune Canadien homosexuel, végan et plutôt progressiste s’est-il retrouvé au service du fondateur du média américain d’extrême droite Breitbart. Lequel, à l’été 2016, est devenu le chef de campagne de Donald Trump. À ce titre, Wylie aurait aidé le candidat Républicain à se faire élire, moyennant une pêche miraculeuse d’informations sur Facebook. Mais depuis qu’il a révélé les détails de l’opération, samedi 17 mars 2018, rien ne va plus pour le réseau social. Deux jours plus tard, alors que son action plongeait de 6,8 %, la multinationale suspendait le compte de Christopher Wylie. En une semaine, Facebook a perdu 50 milliards de dollars.

Dans le même temps, son responsable de la sécurité, Alex Stamos, annonçait son départ ; et son fondateur, Mark Zuckerberg, était invité par la sénatrice Démocrate Amy Klobuchar à expliquer « ce que Facebook sait de l’utilisation frauduleuse des données de 50 millions d’Américains dans le but de cibler une audience politique et de manipuler les électeurs ». Mardi 20 mars 2018, après la sortie des images volées de Channel 4, Cambridge Analytica a annoncé la suspension d’Alexander Nix.

Le lendemain sur les coups de 13 heures, Zuckerberg s’est finalement exprimé sur l’affaire dans un long post publié sur sa plateforme, dans lequel il confesse que Facebook a commis des erreurs. « La responsabilité nous incombe de protéger vos données, et si nous ne le faisons pas nous ne méritons pas de vous servir », écrit-il.

La crise est inédite. Et nombreux sont ceux qui se rangent à l’avis d’un autre lanceur d’alerte, Edward Snowden, selon lequel « Facebook gagne de l’argent en exploitant et en vendant les détails intimes de la vie privée de millions de personnes, au-delà des quelques informations que vous postez volontairement. Ce ne sont pas des victimes. Ce sont des complices. » Est-ce le cas ?

Trafic de données

Depuis que son compte a été suspendu, Christopher Wylie ne peut plus parler à ses amis Facebook. Peu importe. Il reçoit ces jours-ci des tonnes de messages par e-mail ou sur son téléphone. Lorsqu’il a décidé de tout révéler, son père lui a d’ailleurs envoyé une scène de bande-dessinée. Deux personnages sont agrippés à une falaise, suspendus dans le vide. « Accroche-toi ! » conseille le premier. À quoi le second répond : « Je t’emmerde. » Le fils Wylie s’identifie volontiers aux deux, lui qui a dénoncé ses anciens employeurs pour mieux conseiller aux usagers des réseaux sociaux de ne pas lâcher leurs informations personnelles.

« J’ai construit l’arme de guerre psychologique de Steve Bannon », concède-t-il aujourd’hui. L’équipe dans laquelle il opérait a joué « avec la psychologie d’une nation entière dans le contexte d’un processus démocratique ». Et ça, Wylie le regrette aujourd’hui. Car il mesure parfaitement l’importance des ressorts cognitifs. Fils d’une psychiatre, Joan Carruthers, et d’un médecin, Kevin Wylie, Christopher grandit en Colombie-Britannique. Après avoir subi les attouchements d’une personnes atteinte de troubles mentaux, à six ans, le garçon multiplie les visites chez les psychologues. Appuyé par ses parents, il attaque l’école en justice huit ans plus tard, alors qu’elle cherchait à étouffer l’affaire.

Déjà, l’adolescent doit faire face à un autre problème psychologique : souffrant de dyslexie et de troubles de l’attention, il quitte l’école à 16 ans sans diplôme ; mais non sans talent. Un an plus tard, le voilà au travail dans le bureau du leader de l’opposition canadienne. À 18 ans, Christopher Wylie reçoit l’enseignement du responsable en chef du « ciblage » de la campagne de Barack Obama, qu’il s’empresse de présenter aux cadres du parti Libéral canadien. Prenant conscience de l’importance des données négligemment abandonnées sur Internet, il apprend à coder à 19 ans et parfait ses connaissances en marketing à la London School of Economics l’année d’après.

« La politique, c’est comme une mafia », compare Wylie. « Vous n’en sortez jamais vraiment. J’ai reçu un appel des Lib Dems. Ils voulaient que je mette à jour leur base de données et le ciblage de leur électeurs. Donc j’ai commencé à travailler pour eux en parallèle de mes études. » Alors qu’il poursuit avec un doctorat dans la mode, Christopher Wylie tombe en 2013 sur un article écrit par deux chercheurs du Cambridge Univeristy’s Psychometrics Centre, Michal Kosinski et David Stillwell. Son titre est sans ambiguïté : « Les traits de personnalités et le caractère sont prévisibles en fonction du comportement humain en ligne ».

En 2007, quand il était encore étudiant, Stillwell a remarqué l’émergence de tests de personnalité sur Facebook, parmi lesquels myPersonality. Dans ce questionnaire devenu viral, les utilisateurs étaient classés en fonction de cinq traits : l’ouverture d’esprit, l’état de conscience, l’extraversion, l’amabilité et le névrotisme. Pour obtenir leur score, 40 % des internautes ont accepté de donner accès à leur profil Facebook. Leur personnalité pouvait ainsi être mise en relation avec les pages qu’ils aimaient.

Cette année-là, le réseau social de Mark Zuckerberg est en plein essor. Déjà utilisé par 30 millions de personnes, il continue de se développer à la faveur du lancement de l’iPhone. Le problème, souligne Frederike Kaltheuner, directrice du Privacy International’s Data Exploitation programme, « c’est que Facebook utilise ces données de façon à ce que ses utilisateurs ne comprennent pas véritablement comment ». Le fait qu’elles servent à afficher des publicités selon le profil de chacun ne fait aucun mystère. Mais « le groupe a autorisé des tiers à accéder à des informations privées », pointe la chercheuse.

Dans un article publié en 2012, Michal Kosinski et David Stillwell constatent que myPersonality a été utilisé par des projets de recherche en science sociale pour mettre en évidence des corrélations entre certains goûts et comportements. Par exemple, hasard ou non, les personnes qui aiment la page « I Hate Israel » ont aussi tendance à apprécier les chaussures Nike et les Kit Kat. On comprend aisément l’intérêt que représentent de telles indications pour les marques. « L’industrie publicitaire sur Internet a créé un écosystème complexe fait de milliers d’entreprises qui traquent chaque geste des gens », analyse Frederike Kaltheuner. Cambridge Analytica a exploité le système pour des campagnes politiques.

Une guérilla culturelle

À la fin du XIXe siècle, les libéraux incarnaient la principale force politique britannique. Entre 1868 et 1894, leur leader, William Gladstone, a occupé le rôle de Premier ministre à quatre reprises. Ce natif de Liverpool demeure la figure tutélaire d’un mouvement qui s’est lentement affaissé au cours du siècle dernier, laissant place à un système bi-partisan dans lequel le pouvoir est ordinairement disputé par les conservateurs et les travaillistes. Le courant d’idées a certes connu un regain de popularité lorsque libéraux et socio-démocrates se sont alliés en 1988 pour devenir les Lib Dems. Reste que leurs scores ont plongé de nouveau après 2011.

Christopher Wylie

« Je voulais savoir pourquoi les Lib Dems étaient si nuls pour gagner des élections alors qu’ils dirigeaient le pays jusqu’à la fin du XIXe siècle », explique Christopher Wylie. « J’ai donc commencé à compiler des données démographiques afin de voir ce que les électeurs du parti ont en commun, parce qu’en dehors de certains coins du Pays de Galles et des Shetlands, ils se trouvent dans des régions disparates. Je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas de corrélation ; rien ne ressortait dans les données. »

Si les personnes enclines à voter pour les Lib Dems ne vivent pas à un endroit particulier, c’est qu’elles doivent posséder des valeurs communes et, d’après un article que dévore Wylie, des traits de caractère similaires. « Le libéralisme est lié à une grande ouverture et un faible état de conscience », estime le Canadien. « Quand vous pensez aux Lib Dems, vous imaginez des professeurs perchés et des hippies. Ce sont des avant-gardistes, ils sont ouverts à de nouvelles idées… » Quitte à être un peu caricatural, ce constat donne une indication sur les viviers d’électeurs potentiels. Sauf que les cadres du parti ne sont guère intéressés.

« Je leur ai dit qu’ils allaient perdre 57 sièges et tout ce qu’ils ont trouvé à me répondre, c’était : “Pourquoi êtes-vous aussi pessimiste ?” » se souvient Wylie. En mai 2015, le parti réalise son pire score à une élection nationale, poussant son leader, Nick Clegg, à la démission. Le jeune analyste de données a mis les voiles un an plus tôt, attiré par la « liberté » que lui offrait Alexander Nix à SCL Group. Il se retrouve dans une agence habituée à travailler tant dans le monde militaire que politique. Parmi ses clients, il y a notamment le ministère de la Défense britannique et celui des États-Unis. Pour eux, il mène des « opérations psychologiques » ayant pour but de rallier le public à une cause. Cela passe notamment par la propagation de rumeurs ou de fausses informations.

Cambridge Analytica n’est pas la seule entreprise à opérer dans ce domaine. Michal Kosinski et David Stillwell ont été approchés par de nombreuses sociétés ainsi que des services de sécurités. Le doctorat du premier a été financé par Boeing ; et ses travaux citent à au moins deux reprises la DARPA, l’agence américaine chargée de développer des projets de sécurité. Ancien officier de la marine américaine, Steve Bannon mène désormais une guérilla culturelle à la tête de son média Breitbart. Et il prépare une opération commando en faveur de Donald Trump.

Lorsque Christopher Wylie le rencontre à l’automne 2013, Bannon lui fait l’effet d’un homme intelligent : « Il a tout de suite compris. Il a foi en la théorie d’Andrew Breitbart selon laquelle la politique découle de la culture, et qu’il faut donc d’abord changer la culture pour changer la politique. » Sa conviction est si forte qu’il est nommé vice-président de Cambridge Analytica en juin 2014. Aussi rejoint-il la filiale politique d’un groupe qui gère des opérations de contre-terrorisme au Moyen-Orient pour le compte du département de la Défense américaine.

Au moment-même où Bannon est nommé, SCL Group signe un contrat avec l’entreprise Global Science Research (GSR), dirigée par un chercheur de Cambridge, Aleksander Kogan, et un psychologue social, Joseph Chancellor, qui rejoindra Facebook en novembre 2015. Ce n’était pas le premier choix de Wylie : aucun accord n’a été trouvé avec Kosinski et Stilwell, mais GSR a proposé de se servir de leurs recherches. D’après les documents en la possession du Canadien, Cambridge Analytica a dépensé sept millions de dollars pour collecter des données, dont un million a été versé à GSR.

Kogan a créé une application, thisismydigitallife, capable de récolter non seulement les données de ceux qui l’installaient sur leur Facebook, mais aussi celles de leurs amis. Les 32 000 personnes qui ont fait le test ont donc donné accès à au moins 160 autres profils chacun. En quelques semaines, les informations personnelles de millions de personnes étaient connues. « Facebook pouvait voir ce qui se passait », affirme Wylie. « Leur protocoles de sécurité ont été déclenchés car les applications de Kogan amassaient une quantité énorme de données, mais celui-ci leur a apparemment répondu qu’il s’en servait pour des recherches académiques. Donc ils ont juste dit “OK”. »

Donner ses données

Christopher Wylie a quitté Cambridge Analytica dès 2014. Mais, deux ans plus tard, en août 2016, les avocats de Facebook lui envoient un message lui demandant de supprimer les données obtenues. Le courrier précise que « GSR n’était pas autorisé à les partager ou les vendre ». C’était déjà chose faite, rétorque le Canadien : « J’ai juste dû cocher une case, signer un document et le renvoyer. Facebook n’a fait aucun effort pour récupérer les données. » De son côté, Aleksander Kogan travaille toujours à l’université de Cambridge. Il est aussi professeur associé à la fac de Saint-Pétersbourg. À ce titre, il a reçu des financements du gouvernement russe afin d’effectuer des recherches sur « le stress, la santé et l’état psychologique sur les réseaux sociaux ».

De manière plus indirecte, Cambridge Analytica a aussi travaillé pour Moscou. Dans un e-mail en date du 17 juillet 2014, Alexander Nix apprend à Wylie que l’agence va écrire un document destiné à Lukoil, le géant du pétrole russe. Ce travail doit être « partagé avec le PDG », à savoir l’ancien ministre de l’Industrie des hydrocarbures Vagit Alekperov. Or, il concerne un domaine qui n’entre à priori pas dans les attributions de la société : « Ils comprennent à quoi sert le micro-ciblage dans un contexte électoral », ajoute Nix, mais « ils ont du mal à faire le lien entre les électeurs et leurs consommateurs. »

D’après Wylie, ledit document avait moins à voir avec ces « consommateurs » qu’avec la tenue prochaine d’élections. Il aurait été question de les influencer. Il y était notamment expliqué comment une rumeur avait été propagée au Nigéria en 2007 afin d’instiller l’idée que « l’élection serait truquée ». Le besoin de transmettre des « messages psychographiques » était aussi souligné. Lors d’une commission parlementaire britannique sur les fake news, en février 2018, Alexander Nix a déclaré n’avoir « jamais travaillé avec une organisation russe ».

Une station essence de Lukoil, à New York

Devant les caméras cachées de Channel 4, Mark Turnbull a toutefois indiqué que Cambridge Analytica se servait d’autres entreprises, des faux-nez, pour signer certains contrats sans y être impliqué. L’agence, précise Wylie, « pourrait travailler pour n’importe qui ». Ses membres « sont des mercenaires, disposés à servir à peu près tous ceux qui veulent bien payer ». En 2016, ils « avaient un partenariat » avec la campagne en faveur du Brexit, Leave.eu, « mais nous ne sommes pas allés au-delà [d’une présentation] avec eux », jure l’un des militants, Arron Banks.

« Au fond, Cambridge Analytica était la transposition d’opérations de collecte de données militaires et de propagande dans le champ politique de manière a créer une toile de désinformation sur Facebook et d’autres plateformes », résume Wylie. Elle n’est sans doute pas la seule entreprise à s’être allègrement servie sur les réseaux sociaux. « On parle d’elle parce qu’elle est basée au Royaume-Uni, et donc régie par le Data Protection Act de 1998 », remarque Frederike Kaltheuner. « Aux États-Unis, il n’y a pas de loi de protection des données comme en Europe. »

Le problème, pour Wylie est que « des messages ont été envoyés à travers tous les courants d’informations autour de la cible afin qu’elle perçoive les choses comme souhaité, alors que ce n’est pas nécessairement la réalité. » Cambridge Analytica prétend pourtant que les données en sa possession n’ont pas été utilisées pendant l’élection présidentielle de 2016. Les avocats de Steve Bannon assurent pour leur part qu’il « ne savait rien de ces assertions » avant que les médias n’en parlent. Quant à la direction de Facebook, elle a empêché l’accès aux données des amis de ceux qui installent des applications par des tiers. Cette affaire « rompt la confiance entre Facebook et les gens qui partagent leurs données avec nous, et attendent de nous qu’on les protège », reconnaît Mark Zuckerberg. « Nous devons résoudre ce problème. » En moins d’une heure, son message à été partagé plus de 10 000 fois.


Couverture : Mark Zuckerberg. (Brian Solis/Flickr/Ulyces)